TWILIGHT de Catherine Handwick (USA-2008): Les Vampires de Salon

Publié le par Norman Bates





[Photo: "My Condition ["Roll Over Stockhausen" par Dr Devo.]






Mes amis, je viens de voir la bande-annonce du film COCO, réalisé par Gad Elmaleh et distribué dans 694 salles dans notre beau pays. La critique cinéma de Elle a parlé de ce film d'une manière qui m'a remué de fond en comble: "(...) cher Gad, avec tous ces jeux de mots idiots, n'avez-vous pas honte de nous faire rire autant ? ".

 



Dépité, décimé, je décidais de me maquiller le visage en noir et de me rendre séance tenante voire TWILIGHT en V.F, pour tenter de confronter mes souffrances à l'universalité, au cosmos voire à l'absolu.

 



[Difficile de passer après les vidéos de l'Ultime Saut Quantique.]

 





Ma compagne de souffrance ce sera Isabella, 16 ans. Elle doit quitter la Floride pour aller vivre dans le Nord-Pas-De-Calais, chez son père. Ce dernier est un agent de police taciturne dans un petit bled. Il aime bien regarder le baseball sur son écran plat avec ses potes apaches le vendredi soir, muni d'un pack de bière, élément très important dans l'histoire. Isabella se retrouve dans cette ville inconnue, où il pleut tout le temps et où ses petits camarades de lycée semblent étrangement dénués de la moindre parcelle d'intelligence. Heureusement, il y a Edouard, un espèce de bellâtre avec du talc (NdDr: voir photo) sur le visage et des yeux qui changent de couleur quand il y a du soleil. Lui, il est vraiment très mystérieux, et quand ils se retrouvent tous les deux côte à côte en cours de chimie, il refuse de lui adresser la parole. Il va même jusqu'à disparaître pendant une semaine sans raison. Il réapparaît pour sauver Isabella d'un accident de voiture, faisant preuve d'une force et d'une vitesse peu communes qu'il est incapable d'expliquer au comité olympique local. Intriguée, Isabella essaye d'en savoir plus sur ses goûts musicaux. Il lui confesse écouter Debussy le soir, au lieu d'aller en boîte : pas de doute, après recherche sur Google, Isabella est sûre que c'est un vampire. S'ensuit une partie de baseball parmi la belle-famille où elle se retrouve arbitre, ce qui lui vaudra la haine d'un hooligan aux dents longues qui va la poursuivre dans tout le pays.

 



[Hop.]

 




TWILIGHT commence de manière très sympathique, comme un film de collège classique. Présentation de l'héroïne assez rapide: elle est plutôt solitaire et semble avoir des actions chez Apple. L'arrivée au bahut, scène traditionnelle dans le teen movie est expédiée fissa. On retrouve la galerie de personnage habituels, la pouffiasse, l'intello, le sportif, le futur journaliste, le petit malin, et, au fond de la classe, le focalien en culotte courte qui lit du K Dick. Arrivent là-dessus les fameux vampires, mêmes personnalités mais version noir et blanc, et by the way le fameux Edouard. Catherine H. sort son stradivarius, fait péter le ralenti, les regards se croisent, Isabella a du vent dans les cheveux et n'a plus d'yeux que pour ce gars. Ce n'est absolument pas subtil pour un sou, mais il y a un peu de cadrage, des petites idées de mise en scène (la chouette) et une photo luxueuse. En gros la première partie du film  fait honnêtement son boulot, même si l'actrice est vraiment relou avec ses mimiques d'ado éprise digne de HARTLEY COEUR A VIF et qu'Edouard a vraiment un visage splendouillet (il ressemble à un lego).

 



Bon après c'est complètement nul, en gros à partir du moment où ils sortent ensemble. La mise en scène perd complètement les pédales : zooms caméra dignes d'un film de kung fu, travellings dans tous les sens, effets 3d un peu partout pour montrer que le personnage va très vite (il court comme Speedy Gonzales dans le dessin animé (!)) et on s'ennuie beaucoup. La photo devient vraiment moche en forêt, il n'y a plus que des gros plans sur des visages qui expriment l'amour (enfin, c'est ce qu'on a du leur dire au court Florent) et beaucoup de bruit pour rien. Par contre, il y a un truc amusant, certains plans sur les arbres étant un petit peu trop longs alors même qu'ils sont inutiles au procédé narratif. Catherine H. veut vraiment ancrer son film dans les bois, Lady Chatterley n'est pas loin... Mais enfin bon, sortir des sentiers battus, surtout en forêt, c'est toujours agréable. On a l'impression de quitter cette histoire de merde, et de se perdre dans les à-cotés, soit la coulisse du théâtre des opérations.

 



Non vraiment, ceci  n'a que très peu d'intérêt, et frise parfois le totalement ridicule (la partie de baseball en forêt est un monument de mauvais goût cinématographique). En fait, il y a énormément de choses mieux à faire que d'aller voir un truc pareil. Par exemple, ne pas aller voir COCO, ou y aller avec des chiens apprivoisés pour observer scientifiquement leurs réactions aux couleurs et aux sons.

 




[Par contre, il y avait plein de jeunes gens qui voulaient savoir ou était parti Edouard quand il n'était pas là. Moi, j'aimerais bien savoir pourquoi les apaches sont les ennemis jurés des vampires, chose qui est expliquée de la plus grossière des manières pendant le film, un conte incompréhensible avec des loups.]

 




Ce qui aurait pu être intéressant, comme l'intégration des vampires dans la société américaine ou l'impact du nucléaire dans la domotique pour tipis apaches, n'est absolument pas traité et même carrément évité. Les rednecks du coin ne les aiment pas, mais ils n'aiment pas non plus les indiens, ni le Festival de Sundance. On saura à la fin qu'ils aiment la bière. Les vampires ne sucent pas vraiment du sang, c'est juste des mecs comme tout le monde qui vivent dans un loft Ikéa dans une forêt, en prenant bien soin de faire un bilan carbone régulier.

 

Je veux revoir John Hughes.





Norman Bates.



Publié dans Corpus Filmi

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S
au moins 2 ans que je n'avais pas mis les pieds ici et cette critique me rejouis. Un tres grand merci
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