RENCONTRES À ELIZABETHTOWN, de Cameron Crowe (USA-2005) : Pour un Cinéma de l'Elite !

Publié le par Mr Mort

(Photo : "En salle de repos, dans les locaux de Matière Focale" par Dr Devo)

Cinémort,
 
Me revoilà dans de nouveaux territoires que j'ai cherchés rien que pour toi, et pour épanouir ton impertinent et érotique concept !
 
Hommage ici Dr Devo, rentre ici avec ton cortège de fucking modesty et de bloody pudeur, toi le flamboyant, qui tel l'auvergnat, a su m'accueillir quand dans mon blog, il faisait froid. Depuis que je suis réfugié politique sur ce site, chassé de mon propre blog par moi-même, Dr Devo a accueilli une partie de mes articles (mais pas tous !), m'a fait une rubrique rien que pour moi, la classe dis-je, mais je n'avais jamais créé ici. OK. Bon. Ainsi soit-il, si vous insistez.
 
Cinémort, le beau concept. C'est foutu, le corps bouge mais c'est les nerfs. Monsieur Peter Greenaway, un autre génie (allez, après tout, je ne suis plus sur mon petit site confidentiel, je m'adresse au très grand public maintenant, je peux me le permettre), mais heureusement moins modesto-inverti que Devo le Dr, disait que le cinéma, ben oui, mais vous voyez, c'est trop tard ! On aurait pu créer du cinéma et en faire, mais c'est trop tard. Monsieur G. marque sans doute là un point, Dieu que je suis drôle, en disant que non, non, le cinéma n'existe pas encore, et qu'on est encore au niveau du coloriage de maternelles, mets-y ta couleur orange dans la case 5, et basta.
Je résume pour plus de clarté.
Monsieur G. vit dans une grande maison. Ce matin, il se lève et dit, en ouvrant ses rideaux : "Quelle belle journée qui s'annonce ! Vite, c'est l'heure du petit déjeuner, descendons à la cuisine, mais cependant, je pense que le Cinéma n'est pas encore arrivé, et c'est sans doute trop tard".
Mr Mort vit dans un petit appartement. Ce matin, il se lève et dit, en ouvrant  ses rideaux : "Allez, hop, on se lève, j'ai déjà passé l'heure du petit déjeuner. Une douche et je file acheter mon journal, et je pense que le Cinémort est la seule chose certaine en matière d'audiovisuel !"
 
Deux théories, deux façons de voir, mais avouez que ça se rejoint, comme deux lignes parallèles, à l'infini. Cymbale, on change de paragraphe.
 
Bah, moi, si j'étais un autre, je ne ferais pas de résumé ! Après tout, il y a assez de blog de "résumés de films", sans compter les allociné.com et consorts... Mais bon, puisque je suis ici nouvellement chez moi, je me plie aux coutumes et mets les patins pour aller chercher le champagne sur le buffet là-bas, à côté des petits fours !
 
Ah, Orlando Bloom ! Loin de son arc, et ici brune ! C'est déjà plus crédible. Le Marquis a dit à Devo qui m'a dit qu'il fut pressenti (Orlando Bloom, pas le Marquis !) pour reprendre le rôle de James Bond ! Oui les gars ! Bien vu !  Un James Bond gay de 18 ans ! Très crédible ! Malheureusement pour notre amusement à tous, il n'a pas été choisi. Ici, il joue un super-cadre dans une des plus grandes fabriques de chaussures de sport du monde, style Nike. Bon. Il vient de développer une nouvelle chaussure révolutionnaire qui a pris huit ans de perfectionnement, huit ans de travail acharné, pour lui et tous ses collègues. La chaussure sort à grand renfort de matraquage publicitaire, et fait un flop ! Près d'un milliard de dollars de perte sèche. Son patron (Alec Baldwin, très bon et très gros) l'engueule à peine, mais Orlando est carrément déprimé, et tente de se suicider en bricolant son vélo d'appartement (idée très sympa). Malheureusement, un coup de fil interrompt son suicide. C’est sa sœur, Judy Greer (sympa au naturel, et bimbo moche en tenue de soirée) qui lui annonce la mort de son père. Bien. Sa mère, Susan Sarandon, envoie Orlando à Ploucville, là où son père est mort, parmi les siens, afin de rapatrier le cadavre et de régler les affaires courantes. Ja ja, ich gehe, dit Orlando, qui va donc dans cette famille qu'il ne connaît pas, composée de gentils ploucs excentriques mais sudistes.
Dans l'avion vide qui le mène à Ploucville (la compagnie aérienne n'a quasiment plus de passagers et est au bord de la faillite), il se fait aborder par l'hôtesse de l'air, Kirsten Dunst, délicieuse cruchette, une fille très excentrique avec des théories sur tout et une perspicacité quasi-médiumnique, à moins qu'elle (le personnage de l'hôtesse de l'air, pas Dunst elle-même) ait lu le scénario, c'est possible... Elle lui laisse ses coordonnées. Orlando débarque dans les bocaux de cornichons du jardin et dans sa famille méconnue. C'est beaucoup de stress pour ce personnage forcément "décalé" (Ah oui ? Alors pourquoi Bloom alors ?). Il passe sa première nuit au téléphone avec Kirsten Dunst. Comme dirait Alexandre Adler, fin analyste, quand on passe 7 heures au téléphone avec une inconnue, c'est qu'on a des choses à se dire ! Bon dieu, mais c'est bien sûr, je la sens carrément, la romance qui monte !
 
Ceci posé... Il va quand même falloir inventer un nouveau genre, car ça fait un moment que ça traîne. N'ayant pas encore de nom génial à proposer, comme en trouve mon génial patron, le formidable Dr Devo (Bros., oui, oui, peut-être même le groupe), appelons ça "le film de suicide romantique". Voilà !
Un personnage masculin décalé qui n'est pas en phase avec ses contemporains et les observe à travers la paroi du bocal, regarde le monde qui l'entoure (ralentis, ou au contraire accélérés !) sans se sentir concerné, et en déprimant ! Il décide de se suicider, ou est sur le bord de le faire. Il est sympa, cool, il écoute de la zique sympa et cool (mais un peu tristo-nostalgique, de course means bien sûr !), et avant de se laisser mourir, il rencontre une fille excentrique mais formidable, tout en points communs, mais tu comprends, la distance, c'est pas facile, oh puis si, finalement on s'embrasse, générique, et laissez les toilettes du cinéma dans l’état dans lequel vous les avez trouvées, bitte schon.
C’est déjà le deuxième film royco-culte (ou bolino, je ne suis pas sectaire) qui sort cette année. Après GARDEN STATE, méga-génial à l'époque, que tout le monde a oublié depuis, et qui fut défendu ici par Tournevis que j'aime bien de toute façon, que je connais pas tel le Gitan, mais dont Devo me dit le plus grand bien (Dr Devo m'a dit que Tournevis était d'accord sur quelques unes des réserves qu'il émettait (notamment sur la scène bien bousillée, à la fin dans l'aéroport), justement, à propos de ce GARDEN STATE, ce qui semblerait me faire penser à réfléchir sérieusement sur le fait que ce Tournevis n'est pas un obtus, mais un ouvert). Devo n'avait pas aimé le film. Moi non plus, mais qu'est-ce que je disais ?
GARDEN STATE, puis ce RENCONTRES À ELIZABETHTOWN, ben voilà, le genre s'installe. Allez, on va le dire, tout cela a des origines ! Lointaines avec Tarantino (de l'art de  faire des BO riches, au moins en copyright prestigieux ou "cultes"), plus proches avec FIGHT CLUB (qui, bien sûr, est à des coudées nettement au-dessus, ce n'est même pas que ce n'est pas la même Ligue, mais ce n'est carrément pas le même sport). Sauf que... FIGHT CLUB avait quand même d'autres préoccupations, un peu plus matures et surtout moins bourgeoisifiantes, comme on dit ici. Et que du film, ils n’ont pris que l'accessoire, et le moins bon, de course once again. Bah oui, vous comprenez, moi, Cameron Crowe, le  dernier du culte, je vais pas me salir les mains à faire un film de college, vous comprenez, vous faites le parallèle, t'en connais, toi, des réalisateurs de films de college qui ont réussi, alors je fais du "cinéma d'H/auteur", comme dirait Kuhe, ta mère en robe de mariée ou en jean de designer devant Prisu, histoire de leur montrer à ces pauvres... hères !
Genre arriviste donc, le FSR (film de suicide romantique... Faut peut-être rajouter quelque chose de méchant : indépendant, indépendantiste, interdépendant ?) Ne veut pas se salir les mains et s'adresse bien sûr aux jeunes possesseurs (pléonasme !) d'i-pod. Tu vas à l'Opéra, tu écoutes "du" rayon indé, tu vas au ciné art et essai voir le Woody Allen (qui parle de toi d'ailleurs, surtout la scène, réussie celle-là, de la bibliothèque), tu fais du sport en club de remise en forme, et t'as une tendresse pour TOUS LES AUTRES S'APPELLENT ALLY MCBEAL (c'est-à-dire FRIENDS et consort, Kirsten, passe-moi un sac...).
 
Sur un air connu et jadis populaire en France, surtout dans le Sud, Cinémort nous voilà ! Si la première bobine fait illusion et est assez sympa (j'aime assez Baldwin donc, et la suppression du programme WWF), après ça dégénère sec. Les scènes sont longues, interminables et pourraient être deux fois plus ou trois fois moins longues et / ou courtes, sans que ça ne gène personne. Le propos est débile, bien sûr, et plaira à ceux qui adorent aller pleurer sur les FDM (films de M...aladie !), ce qui me fait penser que, ah oui, MMM, yummy yummy, le prochain Ozon avec la Grande Dame du Cinémort Français, Jeanne A-Moreau, mais je m'égare.
 
Atomisée, la construction de quoi que ce soit, atomisé le scénario (car ELIZABETHTOWN est évidemment un film de scénario), atomisée la notion de rythme, et roule ma poule, voilà la Cinémort nouvelle qui arrive, en même temps que le boujeaulais de comptoir... Pas de cadre, ou alors un grand plan hollywoodien en hélico sur la ville (je suis vache, il y a un plan qui semble réel : Orlando de dos dans la première voiture, qui boit un café ; le reste, poubelle !). Montage niet, sauf pour les dialogues, je parle quand je suis à l'écran, que des plans rapprochés, comme disait le Dr Pertino, photographie nullissime, décors hideux, vêtements itou, beurk.
Il n'y a rien. C'est long comme un jour sans pain. Et surtout, ça se base sur un autre principe, déjà présent dans GARDEN STATE, mais exprimé ici puissance 1000 : la mise en scène, c'est la musique ! Ben oui, le jeu consiste à faire des couloirs entiers de musique avec son petit montage en ellipse, où les acteurs essaient de faire le plus de mimiques extra-cools, ils sont sympas, ils font des super-mimiques, ils sont au-dessus de tout ça, mais il sont sensibles, musique, musique, musique. Plus le film avance, moins il y a de scènes dialoguées, et plus il y a de clips. Et à la fin, il n'y a plus que ça. Evidemment, c'est de la grosse musique de Merdre, rayons indépendants, prix vert, découverte de nouveaux talents, genre Norah Jones ou electronikaka, matinée ici de blues sordides sortis des plus basses étagères, et un soupçon de country, mais pas trop, ça ferait plouc, hein ? Bref, la bande-son rêvée pour ceux qui croient encore que FRANZ FERDINAND (si encore il y en avait dans le film !) et les autres font de la musique nouvelle, et qui croient que le brassage musical est preuve d'originalité (allez plutôt acheter un TALKING HEADS les gars, comme l'a déjà dit le bon Dr, à qui je pique ici les métaphores !). Bref, la musique est ignoble, bien entendu, et on préférera écouter KAVALIERE, chanson que le Dr vous offre en haut de la colonne de droite sur la présente page.
Mais ce n’est pas le problème. Le problème, c'est que ces couloirs de zique atomisent la moindre notion de temps ou de montage, et que finalement, on s'y sent bien, dans ce film, comme dans une pub pour Bouygues, un nouveau film, le vôtre en quelque sorte (pour un film FSR, c'est presque logique). C'est pas mal foutu, jusqu'à en être nul comme un FURTIF, film d'été topgunesque et absurde assez sympatoche, c'est même pas ça, c'est moins, c'est une bande. ELIZABETHTOWN est une bande de film 35 mm en polyester, un encodage auquel il ne manque qu'une chose : que les sous-titres changent de couleur au fur et à mesure, car finalement c'est ça, ce film : du karaoké ! D'ailleurs, les Co-Cos (Consternants-Concernés) à qui ce film s'adresse adoreraient et préféreraient que ce film soit karaoké, pour réciter en salles les dialogues avec son mec ou sa nana, dont on kiffe grave la vibe.
 
Je jette un voile pudique sur certaines prestations ou manipulations tellement grosses que je me demande pourquoi ça marche encore, comme l'ignoble personnage de Susan Sarandon, d'abord hystérique consommatrice sans cerveau, puis dalaï-lama en fin de film ! Comme ça, pour le fun. Ou le petit U2 des familles sur la tombe de Luther King ! Ah oui, j'oubliais le boudhissisme du film, pierre supplémentaire du gâteau.
 
Parce que je n'en ai rien à faire, de savoir quelle est la façon la plus cool de faire un clin d'œil ou de saluer quelqu'un d'un geste du bras, parce que moi, le karaoké, vous savez... et parce que le film semble fait en seul plan, bien, rien à faire, je trouve qu'on est en plein Cinémort. Gardez votre argent.
 
Pour ceux qui aiment les histoires, précipitez-vous sur ce film méprisant, au fond, car vous allez adorer, c'est tellement cool. Pour ceux qui veulent de la mise en scène, ben, allez vous suicider dans la salle, tiens... Mais oui, bien sûr, ça y est, j'ai compris... Ce film est fait pour que les gens se suicident dans la salle et dans le bonheur (et dans le zeugma !). Comme dans SOLEIL VERT !
 
Telle la statue de la Liberté dans le célèbre film d'anticipation avec les singes, le cinéma gît, enfoui dans le sable, comme un rocher sans signification, et on n'en voit qu'un minuscule bout. "Mon Dieu, vous êtes fous ? Qu'est-ce que vous avez fait ?"
 
Un Cinéma d'Elites, seulement lui, dans la définition Avertyenne de JC, comme le cite souvent Dr Devo, pourra seul sauver ce qui peut encore l'être... Le Cinéma d'Elite contre le Karaoké... Pour voter pour le karaoké tapez "+infini", pour voter pour le Cinéma d'Elites, tapez Un ! Un, Un, Un, Un, Un, UN !
 
Mr Mort.
 
PS : En fait, ce genre de film lorgne quand même à fond sur PUNCH-DRUNK LOVE qui, malgré les réserves que je pourrais émettre, est quand même du cinéma, lui !

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Publié dans Corpus Filmi

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D
Il s'agit du site:<br /> http://nubula.over-blog.com<br /> <br /> Ne pas mettre de wwww!<br /> <br /> je vais essayer de mon coté de modifier le lien qu'il a posé!<br /> <br /> Dr Devo
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L
Le lien n'a pas l'air de fonctionner, je n'ai pas pu aller te lire !
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N
Hello Matiere focale, <br /> j'apprécie vraiment ton registre désinvolte, je viens d'ouvrir un blog sur le cinéma et d'autres trucs que j'aime, mais rien avoir avec le tien, moi c'est plutôt plapla pour l'instant, mais je pense m'améliorer.<br /> L'autre soir sur arte il ont passé ppphenomena du grand Dario Argento, alors j'en ai profité pour taper rapidement un article à la mémoire de ce génie de la couleur vermillon.
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M
C'est médiocre. rien à retenir de ce film ou presque. Le début peut-être. Kirsten Dunst sûrement.Face à elle, Bloom est vraiment fade
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E
Alors un chaleureux "bienvenu de retour", Philippe U !
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