BON CHIC MAUVAIS GENRE #98: spéciale théma "2-Films-en-1"

Publié le par Dr Devo

BON CHIC MAUVAIS GENRE #98: spéciale théma "2-Films-en-1"

BON CHIC MAUVAIS GENRE, votre soirée double programme consacré au cinéma transgressif, délirant, rare et précieux – programmée par les projectionnistes du cinéma Le Majestic de Lille en partenariat avec les sites Matière-Focale.com et la revue Distorsionvous propose ce vendredi 6 mars une thématique étrange : 2-films-en-1.

Au programme, deux films absolument différents mais qui en commun de proposer deux versions de la même histoire. Mais ce n’est pas tout : car si ces deux films sont des films de genre, ils sont aussi très atypiques et abordent des sujets qu’on ne s’attendait pas forcément à trouver là. Films de genre OFNI-esques, thématiques cachées dans d’autres thématiques, etc. Notre sens de la Réalité, notre vision du Fantasme et du Faux vont être mis à rude épreuve.

Nous commencerons à 19H00, avec le NEW ROSE HOTEL de Abel Ferrara qui réunit 3 monstres du cinéma  (Christopher Walken, Willem Dafoe et Asia Argento) autour d’un thriller S.F très étonnant.

A 21H00, nous retrouverons avec plaisir Peter Strickland (réalisateur des excellents BERBERIAN SOUND STUDIO et DUKE OF BURGUNDY) avec son dernier film injustement passé inaperçu cette année : IN FABRIC. Une histoire étrange et gothique sur les traces d’une robe maléfique !

 

 

19H00 : NEW ROSE HOTEL de Abel Ferrara – USA – 1998 – 93min – VOSTFR- copie numérique (dcp).

Avec : Willem Defoe, Christopher Walken, Asia Argento, Annabella Sciorra, Yoshitaka Amano, Victor Argo, Gretchen Moll, Ryuichi Sakamoto, John Lurie...

Au Japon, dans un futur proche… Fox (C. Walken), sorte de barbouze/homme d’affaire proposant ces services à de grandes entreprises, a un plan qui pourrait le rendre extrêmement riche. Il met au point un stratagème pour que Hiroshi, généticien surdoué, quitte la firme hollandaise pour laquelle il travaille pour rejoindre une grande entreprise japonaise. Depuis plus d’un an, Fox monte cette délicate opération ultra-secrète avec l’aide de son ami X (W. Dafoe).

Mais Fox est persuadé d’une chose : il faut attirer et convaincre Hiroshi de manière moins cérébrale. X engage alors Sandi (A. Argento), une jeune prostituée, pour séduire le généticien et le convaincre de quitter sa firme.

 

A Bon Chic Mauvais Genre, on adore Abel Ferrara dont nous avions déjà passé 3 films.

Grand réalisateur américain, auteur reconnu et respecté dans les années 90 (et beaucoup moins après, hélas), Ferrara, bien qu’on le classe dans la catégorie "art et essai", a souvent emprunté les chemins du film de genre. Ici, il adapte la nouvelle de William Gibson, grand écrivain de SF, un des pères fondateurs du genre cyberpunk.

Réalisé avec un budget modeste, le film est une adaptation très libre mais fidèle à l’univers original de Gibson. Pas d’effets spéciaux à gogo, pas de délires baroques à la MATRIX, comme on s’en serait douté de la part du cinéaste américain.

NEW ROSE HOTEL se veut plutôt être un thriller d’anticipation qui reprend les thématiques assez visionnaires du genre cyberpunk : hommes d’affaires corrompus, barbouzeries en tout genre, disparition des états nationaux aux profits de grand trusts industriels mondialisés, etc. Le film nous promène dans les coulisses glauques du monde des affaires mais, très vite, avec l’arrivée d’Asia Argento dans l’affaire, on comprend qu’il s’agira aussi d’une histoire plus ambiguë où le fantasme, l’amour et le sexe ont toute leur importance. Thriller ? Film de SF bizarre ? Histoire d’amour bouleversante ? Nous sommes perdus avec délice.

Ferrara, très sûr de lui, film son petit monde de manière instinctive, multipliant les supports (très belle utilisation de la vidéo notamment), en restant proche de ses étranges personnages. Petit à petit, le spectateur se perd avec plaisir dans un kaléidoscope étrange de sensation et d’informations. Et on est sidéré, au final, de découvrir avec force, un monde désespéré, où on ne sait pas forcément à quel endroit du monde on se trouve, où tous les endroits, de Marrakech à Berlin en passant par Tokyo, se ressemblent absolument tous. Un village-monde déshumanisé, aux personnages changeants et/ou interchangeables, où, comme disait le poète, "rien n’est vrai et tout est permis". Et si c’était ça, la réussite la plus éblouissante du film : prophétiser et faire ressentir la réalité toute virtuelle d’une société entièrement mondialisée et uniquement dirigée par le Marché !

L’amour est-il seulement possible ?

Vous le saurez en venant voir NEW ROSE HOTEL, film troublant, toujours touchant, et entraîné par un Willem Dafoe impeccable et impliqué, par un Christopher Walken délirant et par une Asia Argento formidable. Ferrara les filme avec plaisir, et grâce à eux, fait ressortir une peu de tendresse dans un monde sombre et implacable. Film étonnant, mais très grand film...

 

 

 

 

21H00 : IN FABRIC de Peter Strickland – USA – 2018 – 118min – Interdit aux moins de 12 ans - copie numérique (dcp).

Avec : Marianne Jean-Baptiste, Fatma Mohammed, Leo Bill, , Harley Squires, Julien Barratt, Steve Oram, Gwendoline Christie, Jaygann Ayeh, Richard Bremmer, ...

 

Sheila, une femme noire anglaise de 45/50 ans, a une existence discrète. Récemment divorcée, elle vit avec son grand fils dans une petite maison anonyme. De temps en temps, elle passe une annonce dans la rubrique "rencontres" du journal local.

Et justement, dans quelques jours, elle a rendez-vous avec un homme. Elle décide de s’acheter une robe. Et ça tombe bien,car ce sont les soldes d’hiver dans le grand magasin de prêt-à-porter Dentley & Sopper’s.

Mais ce magasin est bien étrange : l’ouverture au matin ressemble à un rituel mystique et bizarroïde, les employées sont habillées de manière curieusement anachronique, et la directrice des ventes accueille ses clientes avec des phrases aussi poétiques qu’ésotériques !

Sheila trouve tout de même quelque chose à se mettre : une superbe robe rouge, un exemplaire unique qui lui va comme un gant, étrangement, malgré ses rondeurs.

La vie de Sheila va basculer en achetant la robe. Quel maléfice ou quelle malédiction cache-t-elle ?

 

 

Après un très remarqué BERBERIAN SOUND STUDIO et le sublime DUKE OF BURGUNDY (qu’on vous avait présenté à BCMG il y a quelques années), Peter Strickland revient avec ce IN FABRIC et encore une fois, le dépaysement est total.

Strickland est un sans doute un grand obsédé du cinéma de genre, un amoureux du gallio, et en cela il signe des films très baroque, à l’esthétique très soignée, entre réappropriation de ce cinéma qu’il adore et développement extrême, jusqu’au fétichisme (aux sens propre et figuré) parfois de ces propres obsessions. Au final, les films de Strickland ne ressemblent à aucun autre et sa place dans le cinéma contemporain est complètement atypique.

Comme d’habitude, le réalisateur met un soin maniaque à construire un univers composite et inédit, à travers des décors ultra-travaillés (même quand il s’agit d’environnements banals), des costumes originaux, et une direction artistique magnifique et poussée. Et même si ici, on est dans une mise en scène et un décorum moins "stylisé" que DUKE OF BURGUNDY, et si le scénario est plus "balisé" avec une histoire plus frontale et moins abstraite, Strickland arrive quand même à nous perdre avec délice et à nous plonger dans un univers hors du temps, entre réalité déviée et onirisme latent.

Une autre force du réalisateur : il se remet en jeu à chaque film. IN FABRIC est très différent de son prédécesseur. Ici, à travers le récit d’une robe meurtrière et/ou maléfique, Peter Strickland nous offre, au final, une première histoire puis une seconde qui composent un récit contemporain mais gothique. De petit décalage en petit décalage, de petite situation malsaine en petite situation malsaine, IN FABRIC voit son univers lentement dévié pour devenir de plus en plus cruel et poétique. Au fur et à mesure du processus, le film acquiert toute son étrangeté et sa personnalité.

Elèment nouveau chez Strickland, et ce malgré l’aspect dramatique des histoires ici racontées, l’humour, voire la satire ne sont pas absents. Le spectateur est alors charmé et surpris de voire le récit gothique devenir plus inattendu, voire parfois cocasse et loufoque. Ce qui n’empêche pas d’ailleurs que la peur soit au rendez-vous.

Comme d’habitude chez Strickland, tout est magnifique. Le montage et le découpage sont puissamment évocateurs, et sont maniés de main de maître. Le travail sur le son est magnifique, et la photo est sublime.

Mais petit à petit, en suivant le parcours de l’excellentissime actrice Marianne Jean-Baptiste, puis en visitant les nombreuses histoires et trajectoires de la Robe Tueuse, un autre récit se dévoile, et là, le choc est total.

Car,en effet, IN FABRIC, par petites touches et avant même que l’on s’en rende compte, devient un film extrêmement précis qui met le doigt exactement là où ça fait mal. Le film devient une description et un catalogue (tiens, tiens…) de toutes les humiliations, petites ou grandes, que l’on peut affronter dans notre monde contemporain. Rien n’est épargné aux protagonistes de ces histoires : de la simple ignorance de l’Autre aux petites malpolitesses, des petites pressions sociales aux grandes pressions matrimoniales, de la violence verbale à la violence symbolique la plus insupportable. (Et je ne vous dis pas tout, afin d’éviter tout divulgâchage !)

L’air de rien, en sifflant son petit refrain gothique, en empruntant le chemin de la TWILIGHT ZONE, IN FABRIC se révèle être un des films récents le plus saisissant du cinéma récent, et dévoile toute la partition cruelle d’un monde contemporain (extrêmement réaliste du coup) qui s’est bâti, dans le même mouvement, sur l’Ultra-modernité et l’Humiliation !

On ressort du film ébloui certes, mais aussi terrifié car au fur et mesure que l’on s’éloigne du la salle de cinéma, on s’aperçoit qu’on vient de nous jeter à la figure la peinture précise d’un monde affreux : LE NÔTRE !

 

Dr Devo.

 

Dress-code de la soirée (1 dvd à gagner pour le meilleur déguisement !): Mafieux, agent de la CIA, barbouzes, génie scientifique, prostitué(e), homme/femme d'affaire, barman, maître d'hôtel, tout ce qui a rapport à la Mode, membre de culte sataniste/maléfique, réparateur/bricoleur, vieux pervers, jeunes mariés, manager, Nana Moskouri ou spectateur du Majestic. Les prix pour le concours de déguisement sont donnés au début de la deuxième séance !

Réservations possibles dés le lundi 3 mars à la caisse du Cinéma Majestic à Lille. Soirée proposée par le site Matière Focale.com, le magazine Distorsion et les projectionnistes du cinéma Majestic. Tarifs: 13 euros les deux films / 1 film aux tarifs habituels.

Les cartes UGC illimitées fonctionnent pour les deux films !

Invitez vos amis via la page-évenement facebook de la soirée: cliquez ici !

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Prochain BON CHIC MAUVAIS GENRE: le jeudi 19 mars, à 20h30, avec STAR CRASH, LE CHOC DES ETOILES, en présence du réalisateur.Luigi Cozzi.

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et voici tous les s'mores qui nous aident à comprendre les films.
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